Carnet de Santé 2025 : refonder la protection sociale

Alors que la Sécurité sociale fête, cette année, ses 80 ans, la Mutualité Française publie l’édition 2025 de son Carnet de santé de la France.

Accès aux soins : un défi majeur

Cet état des lieux, nourri par des données publiques et un sondage Odoxa, révèle une inquiétude croissante des Français quant à l’avenir de leur système de santé et de protection sociale. Accès aux soins, autonomie des personnes âgées, prévention, financement et données de santé : cinq grands chapitres dressent un constat clair, assorti de propositions pour refonder la confiance.

L’accès aux soins apparaît comme le sujet le plus préoccupant. Près de deux Français sur trois (65 %) déclarent avoir renoncé à des soins au cours des douze derniers mois, une proportion en hausse. Le délai d’attente est la première cause évoquée (58 %), devant le coût ou l’éloignement. Les jeunes de 18 à 24 ans sont particulièrement touchés : 74 % disent avoir renoncé à consulter.

Le constat est tout aussi préoccupant pour les rendez-vous médicaux. Huit Français sur dix jugent difficile d’obtenir rapidement un rendez-vous chez un spécialiste (84 %, +7 points en un an). Même la médecine générale est désormais concernée : 41 % des personnes interrogées déclarent avoir du mal à consulter rapidement un généraliste, contre seulement 22 % en 2017.

Face à cette situation, les attentes sont fortes. Les Français plébiscitent les mesures visant à inciter les professionnels de santé à s’installer dans les zones sous-dotées (80 %), simplifier leurs démarches administratives (69 %) ou développer des structures pluridisciplinaires (67 %). Autant de leviers que la Mutualité Française soutient activement à travers son réseau de 508 centres de santé et 93 établissements sanitaires à but non lucratif.

Vieillissement et autonomie : un besoin de soutien accru

Autre enjeu : le grand âge. La France compte 2,6 millions de personnes en situation de perte d’autonomie, un chiffre qui pourrait approcher les 3,6 millions en 2040. Les Français expriment une insatisfaction croissante : trois quarts estiment que l’action de l’État est insuffisante en matière de dépendance.

La question des aidants est au cœur des préoccupations : 93 % des sondés jugent indispensable de renforcer les aides aux proches aidants, tandis que 65 % des personnes âgées souhaitent pouvoir rester à domicile, quitte à adapter leur logement. La prévention des chutes, la lutte contre l’isolement et le développement d’offres assurantielles adaptées apparaissent comme des axes prioritaires.

La Mutualité Française, avec près de 900 structures dans le champ du grand âge et du handicap, rappelle son engagement à développer des solutions concrètes : accompagnement à domicile, soutien aux aidants, couvertures dépendance.

Prévention et santé mentale : un retard à combler

Avec seulement 3,9 % des dépenses de santé consacrées à la prévention, la France reste à la traîne par rapport à la moyenne européenne (5,5 %). Pourtant, les attentes sont fortes. L’alimentation (37 %), le bien vieillir (31 %) et l’activité physique (30 %) sont identifiés comme priorités par les Français.

La santé mentale, en particulier chez les jeunes, apparaît comme une urgence : un jeune sur quatre de 15 à 29 ans déclare souffrir de dépression, et plus d’un sur trois ressent fréquemment solitude et isolement. Le lien entre usage intensif des réseaux sociaux et troubles dépressifs est confirmé : 44 % des jeunes y passant plus de huit heures par jour présentent des symptômes.

Pour 84 % des Français, il est nécessaire de développer des actions de prévention afin de limiter l’apparition des troubles psychiques. Accès facilité aux psychologues, renforcement des compétences psychosociales, valorisation du sport et des activités culturelles sont autant de pistes proposées.

Financement et données : entre inquiétudes et espoirs

Les enjeux financiers suscitent eux aussi des inquiétudes : 84 % des Français estiment que le déficit de la Sécurité sociale menace son avenir, et neuf sur dix anticipent une hausse de leur reste à charge dans les prochaines années. Si la confiance envers les institutions recule, les Français attendent une lutte plus ferme contre la fraude et une meilleure pertinence des dépenses.

Enfin, le volet consacré aux données de santé souligne un paradoxe : 86 % des citoyens reconnaissent l’utilité du partage de ces données pour la recherche médicale et l’amélioration des soins, mais seuls 25 % ont activé leur espace numérique personnel « Mon espace santé ». La confiance reste d’abord placée dans les professionnels de santé (93 %), devant les hôpitaux et les mutuelles.

Un appel à l’action collective

Au fil de ses pages, le Carnet de santé 2025 trace les contours d’une « troisième voie » défendue par la Mutualité Française : ni étatisation complète, ni financiarisation du système, mais un modèle solidaire, durable et soutenable. Pour avancer dans ce sens, la fédération lance les États généraux de la santé et de la protection sociale, une démarche participative en vue de l’élection présidentielle de 2027.

L’objectif : bâtir une plateforme de mesures concrètes, fruit d’un consensus entre citoyens, professionnels et acteurs de terrain, pour relever les défis de demain et préserver ce bien commun qu’est la santé.